Conférence d’Athanasia Liabotis sur le changement climatique et « réémergence » des pathologies infectieuses le 18 novembre 2020

Conférence d’Athanasia Liabotis

Mercredi 18 novembre 2020 à 19h en vidéoconférence

« Changement climatique et « réémergence » des pathologies infectieuses :

un enjeu de santé publique à l’échelle mondiale »

 

Titulaire d’un doctorat en physiologie et physiopathologie au Collège de France et d’un mastère de management pharmaceutique et biologique à l’ESCP. Madame Liabotis est désormais spécialisée dans la valorisation de la recherche et la mise en place de projets de recherche pour coordonner le monde académique industriel.

Sa conférence s’est déclinée en quatre temps :

  • Les conséquences d’exposition et les vulnérabilités face au changement climatique ;
  • L’impact du changement climatique sur la réémergence des pathologies infectieuses ;
  • Les enjeux des outils de modernisation de l’impact du changement climatique sur les maladies infectieuses
  • Pathologie infectieuse : quels défis pour les laboratoires pharmaceutiques ?

Les conséquences d’exposition et les vulnérabilités face au changement climatique

Les conséquences d’exposition et la vulnérabilité face au changement climatique sont liées principalement aux variables climatiques qui se traduisent par une augmentation de 1 °C de la température depuis l’ère préindustrielle – dont 0,8 °C depuis 1970 et actuellement de 0,2 °C, en moyenne, par décennie.

L’aspect climatique a des conséquences sur le niveau des océans par une augmentation des précipitations au niveau des latitudes hautes et une baisse de celles-ci pour la région de latitudes moyennes (régions sèches). En outre, l’apparition d’événements extrêmes, tels que des températures très basses ou très élevées dans certains endroits de la planète et à des moments précis de l’année, est liée à plusieurs phénomènes, en particulier le phénomène « El Nino » qui accentue le réchauffement anormal des océans à hauteur de l’équateur.

L’impact du changement climatique sur la réémergence des pathologies infectieuses

Ces effets du changement climatique ont des conséquences sur la santé selon l’OMS qui leur attribue 23 % des décès. Des transformations écologiques agissent également sur la santé, par exemple, la pathologie liée aux températures comme la grippe ou des épisodes de stress post-traumatique. Des conséquences indirectes sur la santé apparaissent également comme l’approvisionnement en eau, la diminution du rendement alimentaire, une nouvelle dynamique de transmission des maladies infectieuses et des conflits.

Une telle situation engendre une migration des populations avec environ plus de 150 millions de personnes d’ici 2050 et un milliard d’ici la fin du siècle, renforcée par des décisions des États aussi bien sociales que politiques. Ce déplacement de populations devient un facteur de menace, un accélérateur d’instabilité et du risque de transmission des maladies infectieuses. La population migrante est soit exposée, soit porteuse d’infection, soit cible d’une réintroduction d’infection.

Les maladies infectieuses se transmettent, soit directement par contact intime comme le VIH, soit par le milieu ambiant comme la grippe, ou encore par un vecteur tel un le moustique anophèle, responsable du paludisme, lequel s’attaque au foie puis aux globules rouges et dont les symptômes sont la fièvre, des maux de tête, des vomissements 10 à 15 jours après la piqûre.

Pour cette seule maladie, dont le traitement est onéreux pour la société, ce sont 500 000 décès chaque année, un enfant qui en meurt toutes les deux minutes, et 500 millions de cas cliniques rapportés par an, 40 % de la population mondiale victime de cette maladie et 100 pays concernés.

Les enjeux des outils de modernisation de l’impact du changement climatique sur les maladies infectieuses

Comment la science et les outils actuels peuvent-ils nous aider à prévenir ces épidémies ?

Daniel Bernoulli a écrit, en 1760, un essai sur une nouvelle analyse de la mortalité causée par la petite variole et des avantages de l’inoculation pour la prévenir. C’est le début de l’apparition des modèles mathématiques pour la représentation d’un objet, d’un système, d’un phénomène issu du monde réel à travers le langage mathématique.

Il y a un réel enjeu des outils de modélisation de l’impact du changement climatique sur les maladies infectieuses. Par exemple, des études démontrent une augmentation de la durée de la saison de transmission du paludisme dans des régions montagneuses du monde (Cf. l’étude « impact of climate change on global malaria distribution » de M. Caminade).

Les limites des modèles ont un impact sur l’adaptation du parasite et de son vecteur aux futures conditions expérimentales. Des modèles biologiques de plus en plus complexes sont associés à une disparité de modèles conçus à l’échelle spatiale et à l’interdisciplinarité des variables. Toutes ces modélisations sont réalisées dans un environnement politico-économique, social et médical. L’enjeu est, par conséquent, de même nature, à savoir, scientifique, politique et économique pour les autorités publiques et industrielles.

Le changement climatique et la pathologie infectieuse : quels défis pour les laboratoires pharmaceutiques ?

L’étude Morgan Stanley « Climate Change Raises Risk of Infectious Disease ; Sizing the Impact on Biopharma® » relève que les conséquences sur la santé du changement climatique est source de profit financier pour les laboratoires, notamment, pour les maladies à transmission vectorielle.

Le changement climatique a, également, des effets sur les défis de la recherche et de la fabrication de médicaments ainsi que sur leur autorisation de mise sur le marché au niveau international. Les grands laboratoires se disputent la course sur les quatre axes de gouvernance (production, partage du marché, influence et relations avec les gouvernements).

En conclusion, force est de constater que la couverture géographique déséquilibrée de la recherche engendre de nouveaux modes de collaboration pluridisciplinaire et inter-pays en intégrant une harmonisation des différentes techniques de recherche. Mais l’enjeu le plus crucial de demain est bien la collecte des données et la mise en place de partenariats public-privé. Quelle sera, alors, notre résilience face à ces pathologies liées au changement climatique?

Éric Bertrand

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Depuis quelques décennies, l’ensemble de la communauté scientifique et l’organisation mondiale de la santé (OMS) s’accordent à démontrer que le changement climatique représente un enjeu de santé publique majeur.

Les changements climatiques ont un impact à la fois direct sur notre santé via la transformation durable de l’environnement (variation des précipitations, des températures et évènements climatiques extrêmes) et indirect via la modification des systèmes de production alimentaire, des ressources en eau et le déplacement des populations.

Ces effets ont également des conséquences dans la transmission et la propagation des pathologies infectieuses. Le réchauffement climatique a déjà causé des changements profonds dans la prévalence et la sévérité de certaines pathologies infectieuses vectorielles.

La modélisation mathématique est devenue un outil essentiel pour étudier la complexité des interactions entre le changement climatique et les maladies infectieuses et représente un défi pour la recherche scientifique et médicale. La compréhension de ces problématiques constitue ainsi un enjeu sanitaire et socio-économique de premier ordre pour les politiques de santé publique et les industriels du secteur.

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Athanasia Liabotis est titulaire d’un doctorat en physiologie et physiopathologie vasculaire (Sorbonne Université) qu’elle a réalisé au sein du Collège de France. Après un Mastère spécialisé en Management Pharmaceutique et des Biotechnologies au sein de l’ESCP Business School, Athanasia s’est désormais spécialisée dans la valorisation de la recherche et la mise en place de projet de recherche collaboratif entre le monde académique et industriel.
À la suite d’une première expérience dans un grand laboratoire pharmaceutique, elle exerce
maintenant ses fonctions à l’Institut du Cerveau à Paris